TEMPS QU'IL FAIT
Les éditions Le temps qu’il fait, dont le nom s’inspire d’un titre du poète libertaire Armand Robin (1912-1961), ont été créées par Georges Monti en 1981.
Leur catalogue s’est développé dans une grande indépendance à l’égard des doctrines, modes ou influences du moment, guidé seulement par le goût des livres, l’amour de la littérature et la confiance peut-être un peu désuète dans la portée politique du langage — qui peut faire de l’expérience d’un seul le bien de tous.
Balançant, depuis leurs débuts, entre la figure (passablement péremptoire) de l’«éditeur d’honneur» et celle (trop réservée) de l’«éditeur introuvable», elles ont publié au cours de ces 40 années d’artisanat obstiné près de 700 titres dans lesquels on devine leur passion sans exclusive pour la langue et leur intérêt non moins ouvert pour les images.
À toute «stratégie» éditoriale (dont, au reste, elles n’auraient pas eu les moyens) elles ont préféré la constitution, pour ainsi dire élective, d’un ensemble d’auteurs originaux, d’une addition de talents singuliers et l’affirmation d’un choix délibéré de livres qui valent avant (et après) tout par l’intensité de l’écriture, des livres qui (comme l’a écrit Giorgio Manganelli) «veulent la relecture».
Assumant pleinement leur statut de petit éditeur, elles poursuivent désormais, non sans faire, avec plusieurs autres, ce constat quelque peu désabusé : le rétrécissement de leur rôle (poisson-pilote ou voiture-balai), la raréfaction des grands lecteurs, l’accroissement des coûts réels de diffusion, la diminution de la reconnaissance médiatique ne sont que les symptômes apparents d’un profond bouleversement de la vie du livre — dont il incombe à chaque acteur, de l’auteur au lecteur en passant par tous les médiateurs possibles, de retarder la déconfiture, avec acharnement.